
A LA UNE
Loi industrie verte
La loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l’industrie verte a été publiée au Journal officiel du 24 octobre 2023.
Cette loi contient plusieurs mesures visant à faciliter et accélérer l’implantation de projets industriels dans le secteur des énergies renouvelables, notamment :
– La modification de la procédure d’autorisation environnementale (article 4 – applicable aux demandes d’autorisation environnementale déposées à compter d’une date fixée par décret et, au plus tard, le 23 octobre 2024) avec pour objectif de réduire de moitié les délais réels d’implantation des installations (de 17 à 9 mois) :
· L’instruction comportera dorénavant deux phases (et non plus trois) : une « phase d’examen et de consultation » suivie d’une « phase de décision » (article L. 181-9 modifié du code de l’environnement)
· le déroulement de la procédure de consultation du public est modifié: elle commence dès la recevabilité du dossier de demande d’autorisation environnementale (nouvel article L. 181-10-1 du code de l’environnement) et sera menée en parallèle de l’examen du dossier par les services. Deux réunions – d’ouverture et de clôture – sont organisées par le commissaire enquêteur (ou la commission d’enquête) entre le porteur de projet et le public afin d’améliorer la qualité des échanges. Le rapport et les conclusions sont rendus dans un délai de trois semaines à compter de la clôture de la consultation du public, ce qui met fin à la phase d’examen et de consultation et ouvre la phase de décision (nouvel article L. 181-10-1 du code de l’environnement).
– Mutualisation des procédures de participation du public (article 5) : lorsque plusieurs projets d’aménagement ou d’équipement sont envisagés sur un même territoire délimité et homogène au cours des huit années à venir, il peut être organisé, à la demande d’une personne publique, un débat public global ou une concertation préalable globale pour l’ensemble de ces projets. Dans de tels cas, ces projets, ainsi que ceux envisagés ultérieurement sur le même territoire et cohérents avec sa vocation, seront dispensés de débat public propre ou de concertation préalable propre si leur mise en œuvre débute au cours des huit années suivant la fin de ce débat public global ou de cette concertation globale (nouvel article L. 121-8-2 du code de l’environnement).
– La sanction des recours abusifs : en cas de recours contre une autorisation environnementale, le bénéficiaire de l’autorisation peut demander au juge administratif de condamner le requérant à lui verser des dommages et intérêts si ce recours est « mis en œuvre dans des conditions qui traduisent un comportement abusif » de sa part et qu’il lui a causé un préjudice (article 4 modifiant l’article L. 181-17 du code de l’environnement).
S’agissant de la commande publique, la loi vise à la prise en compte des considérations environnementales et notamment :
– crée deux nouveaux motifs d’exclusion des procédures de passation des marchés et des contrats de concession pour :
· les entreprises ne respectant pas les obligations de publication d’informations en matière de durabilité qui leur incomberont après transposition de la directive n° 2022/2464 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022
· les entreprises qui ne satisferont pas à l’obligation d’établir un bilan des émissions de gaz à effet de serre prévue par l’article L. 229-25 du Code de l’environnement.
– étend à tous les acheteurs soumis au code de la commande publique, dont le montant total annuel des achats est supérieur à un montant fixé par voie réglementaire, l’obligation d’adopter un schéma de promotion des achats publics socialement et écologiquement responsables (SPASER) ;
– accélère la mise en œuvre obligatoire (dès juillet 2024 au lieu d’août 2026) de critères environnementaux et précise à ce titre que l’offre « économiquement la plus avantageuse » s’apprécie aussi en fonction de critères qualitatifs ou environnementaux.
La loi simplifie également la passation des marchés conclus par les entités adjudicatrices, intervenant notamment dans les activités de production et distribution d’énergie, de traitement et distribution d’eau ou de transport, en :
– dérogeant au principe d’allotissement en cas de risque de procédure infructueuse
– autorisant le recours à des accords-cadres pour une durée supérieure à 8 ans lorsque le respect de cette durée présente un risque important de restriction de concurrence ou de procédure infructueuse
– réintroduisant dans le code de la commande publique la possibilité de présenter des offres variables selon le nombre de lots susceptibles d’être obtenus pour les marchés répondant à un besoin dont la valeur estimée est égale ou supérieure à un seuil qui sera fixé par voie réglementaire. Loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l’industrie verte
ENERGIE / ENVIRONNEMENT
Eolien / Dérogation « espèces protégées » : le Conseil d’Etat prononce le sursis à exécution d’un arrêt ayant sursis à statuer en vue de la régularisation d’une autorisation environnementale
Par une décision du 3 octobre 2021, le Conseil d’Etat a prononcé le sursis à exécution d’un arrêt de Cour administrative d’appel ayant sursis à statuer pour régularisation de l’autorisation environnementale délivrée en l’absence de dérogation relative aux espèces protégées (DEP). Le Conseil d’Etat juge que la solution de la Cour administrative d’appel était susceptible d’entraîner « des conséquences difficilement réparables » pour la société, notamment « un retard estimé entre un an et deux ans pour la réalisation du projet » de nature à générer « un surcoût évalué entre 1,8 et 3,6 millions d’euros ».
Eolien : une DEP n’est pas requise au titre des habitats si le projet n’est pas de nature à remettre en cause le bon accomplissement des cycles biologiques des espèces
Par un arrêt du 5 octobre 2023, la Cour administrative d’appel de Toulouse a jugé qu’aucune DEP n’était requise au titre des habitats de chiroptères, aux motifs que, compte tenu des mesures d’évitement et de réduction retenues, le projet n’aurait que des impacts résiduels « modérés » en termes de destruction d’habitats, en l’occurrence des haies, « sans qu’il ne résulte de l’instruction et qu’il ne soit même allégué que la suppression de ces haies serait de nature à remettre en cause le bon accomplissement des cycles biologiques, ainsi que le prévoit l’article 2 de l’arrêté ministériel susvisé du 23 avril 2007 pour imposer le dépôt d’une demande de dérogation ».
CAA Toulouse, 5 octobre 2023, n° 21TL23869
Photovoltaïque au sol : impossibilité d’exciper dans le cadre d’un recours contre une autorisation de défrichement, de l’illégalité de l’autorisation de DEP
Par un arrêt du 28 septembre 2023, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a jugé que la requérante ne pouvait pas exciper de l’illégalité d’un arrêté autorisant une DEP dans le cadre du recours contre l’autorisation de défrichement délivrée pour le même projet, dès lors que cette DEP intervenue postérieurement à l’autorisation de défrichement n’en constituait pas la base légale et que les deux autorisations ne constituaient pas les éléments d’une même « opération complexe ». CAA Bordeaux, 28 septembre 2023, n° 21BX04428
CONTRATS PUBLICS
Hydrogène vert : les modalités de mise en concurrence pour bénéficier du dispositif de soutien financier sont précisées
Le dispositif de soutien financier, prévu par l’article L.812-2 du code de l’énergie, vise à favoriser le développement des capacités de production d’hydrogène renouvelable ou d’hydrogène bas-carbone produit par électrolyse de l’eau, en attribuant une aide au fonctionnement ou la combinaison d’une aide financière à l’investissement et d’une aide au fonctionnement à toute personne installée sur le territoire d’un État membre de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen, exploitant ou désirant construire et exploiter une unité de production sur le territoire national.
La procédure de mise en concurrence prévue par l’article L.812-3 du code de l’énergie est précisée par le décret n°2023-854 du 1er septembre 2023 relatif au dispositif de soutien à la production de certaines catégories d’hydrogène.
Ce décret s’inspire très largement des procédures prévues par le code de la commande publique et prévoit notamment que le ministre chargé de l’énergie, avec l’appui de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, doit mener une procédure restreinte consistant :
– dans un premier temps, à désigner les candidats éligibles, en fonction de critères et conditions définis dans l’appel à projets, soumis, pour avis, à la Commission de régulation de l’énergie.
– une fois les candidats présélectionnés, le ministre doit engager une seconde phase visant à désigner le ou les candidats retenus pour bénéficier du soutien, sur la base des offres remises, exposant notamment les caractéristiques énergétiques et techniques des installations concernées, le délai de mise en service industrielle, la zone géographique d’implantation de l’installation et la puissance recherchée.
Cette seconde phase peut être menée, de manière optionnelle, sous la forme d’un dialogue avec les candidats afin de définir ou développer les solutions de nature à répondre aux besoins de développement des capacités de production d’hydrogène.
Les critères de notation des offres, leur pondération ou leur hiérarchisation devront être indiqués aux candidats.
Les critères quantitatifs devront représenter au moins 70% de la pondération totale, ce qui illustre la volonté des autorités publiques de mettre l’accent sur la qualité des projets plutôt que sur le prix de production de l’H2.
Le décret est en vigueur depuis le 4 septembre 2023.
Report de l’utilisation obligatoire des nouveaux formulaires européens « eForms »
Le règlement d’exécution (UE) 2019/1780 du 23 septembre 2019, dit Règlement « eForms »,établit les nouveaux formulaires types pour la publication des avis de marchés répondant à un besoin dont la valeur estimée est supérieure aux seuils européens.
L’utilisation exclusive de ces nouveaux formulaires « eForms » devait intervenir à compter du 25 octobre 2023.
Toutefois, le ministère de l’Économie indique avoir obtenu de l’Office de publication de l’Union européenne (OPUE) une prorogation de l’application des précédents formulaires issus du règlement (UE) 2015/1985 du 11 novembre 2015, afin de laisser le temps aux acheteurs de se doter des outils nécessaires pour publier ces nouveaux formulaires électroniques.
Les formulaires jusqu’à présent utilisés par les acheteurs pourront ainsi être utilisés jusqu’à la fin janvier 2024.
Communication de la DAJ de Bercy du 12 octobre 2023
La sous-traitance en cascade dans le BTP ne sera pas limitée
Par une réponse ministérielle en date du 12 septembre 2023, le ministre de l’Économie refuse toute limitation de principe à la sous-traitance en cascade.
Après avoir rappelé que le principe du libre recours à la sous-traitance est consacré tant par le droit européen que par le code de la commande publique, le ministre précise qu’une législation nationale ayant pour objet de limiter ou d’interdire la sous-traitance au-delà d’un certain rang :
– méconnaitrait les directives « marchés publics »,
– serait susceptible d’être considérée comme une restriction à la liberté d’établissement et à la libre prestation de services,
– pourrait par ailleurs être regardée comme portant une atteinte disproportionnée aux principes à valeur constitutionnelle de liberté d’entreprendre et de liberté du commerce et de l’industrie.
Selon la réponse ministérielle, le code de la commande publique contient déjà plusieurs dispositifs susceptibles d’atteindre l’objectif recherché, en permettant aux acheteurs de contrôler la chaîne de sous-traitance. D’une part, l’acheteur dispose de la faculté, lorsqu’il estime que le recours à la sous-traitance est susceptible de nuire à la bonne exécution de certains contrats, d’exiger que les tâches jugées essentielles soient effectuées directement par le titulaire lui-même. D’autre part, tout opérateur, quel que soit son rang dans la chaîne de sous-traitance, qui envisage de recourir à un sous-traitant est tenu de le déclarer au maître d’ouvrage et d’obtenir son acceptation et l’agrément de ses conditions de paiement.
Réponse ministérielle publiée au JOAN du 12 septembre 2023, page 8142
Déclaration sans suite de la procédure d’appel d’offres pour la remise en concession de l’aéroport de Nantes – Atlantique
L’État a déclaré sans suite pour un motif d’intérêt général tiré de l’insuffisance de concurrence la procédure d’appel d’offres pour la remise en concession de l’aéroport de Nantes – Atlantique, lancée en octobre 2019.
Une nouvelle procédure sera lancée en tenant compte des conséquences de la crise sanitaire sur le trafic, du renforcement nécessaire des exigences environnementales et des attentes des acteurs locaux.
Décision de déclaration sans suite du 29 septembre 2023
La protection des intérêts essentiels de la sécurité d’un État ne justifie pas toutes les exclusions aux procédures de mise en concurrence
Par une décision en date du 7 septembre 2023, la CJUE a considéré que la Pologne avait introduit dans son droit interne des exclusions non prévues par la directive 2014/24/UE sur la passation des marchés publics.
En l’espèce, la Pologne justifiait l’absence de mise en concurrence des services de production de documents sensibles, tels que les cartes d’identité, passeports, copies de jugement, etc., au motif que l’ouverture à la concurrence de ces services augmenterait le nombre d’entités susceptibles d’avoir accès aux informations relatives à sa sécurité, accroissant corrélativement le risque de fuite de ces informations sensibles. Or, une telle atteinte aux intérêts essentiels de la sécurité de cet État membre serait, au même titre qu’une rupture d’approvisionnement de tels documents, de nature irréversible et constituerait une menace pour la continuité du fonctionnement de celui‑ci, dès lors que les informations ainsi divulguées seraient susceptibles d’être utilisées par des États tiers, des groupes criminels organisés ou des organisations terroristes.
Suivant la position de la Commission européenne, la CJUE sanctionne le raisonnement de la Pologne en considérant que si les États membres disposent d’une marge d’appréciation pour décider des mesures jugées nécessaires à la protection des intérêts essentiels de leur sécurité, ces derniers ne peuvent déroger aux obligations résultants des directives par la seule invocation de ces intérêts.
En conséquence, la Pologne pouvait recourir à plusieurs fournisseurs pour garantir l’absence de rupture d’approvisionnement de ces documents essentiels et imposer des obligations de confidentialité à ces derniers, tout en mettant en concurrence ces prestations dans le respect des règles de mise en concurrence prévues par la directive 2014/24/UE sur la passation des marchés publics.
CJUE, 7 septembre 2023, Commission européenne c/ République de Pologne, aff. C-601/21
La décision de mettre fin à une procédure de médiation préalable obligatoire n’est pas susceptible de recours
Par une décision en date du 2 octobre, le Conseil d’État est venu préciser que « en mettant fin à la procédure de médiation préalable obligatoire, l’autorité administrative ne peut être regardée comme prenant une décision susceptible de recours. ».
En conséquence, les conclusions dirigées contre cette décision doivent être regardées comme dirigées contre la décision initiale de l’autorité administrative ou, le cas échéant, la décision prise sur recours administratif préalable obligatoire.
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