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Les associations de protection de l’environnement n’ont pas d’intérêt à agir contre une convention d’occupation domaniale, accessoire d’un projet éolien

Par un arrêt du 13 juillet 2022, la Cour administrative d’appel de Lyon a fait une application remarquée, dans le secteur éolien, de l’appréciation de l’intérêt à agir des tiers dans le cadre d’un recours en contestation de validité des contrats administratifs ouvert par le Conseil d’État dans sa décision « Tarn et Garonne » (CE Ass, 4 avril 2014, n° 358994).

Pour rappel, dans le cadre d’un tel recours, applicable aux conventions d’occupation du domaine public par la décision École centrale de Lyon, un tiers à la convention n’est recevable à former un recours contre cette convention qu’à la condition d’établir qu’il est « susceptible d’être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses » (CE, 2 décembre 2015, École centrale de Lyon, n° 386979).

En l’espèce, l’association requérante, qui avait pour objet, selon ses statuts, de « sauvegarder, protéger et défendre l’environnement, les espaces naturels, le patrimoine naturel et les paysages » et « de lutter contre tout projet de parcs éoliens susceptibles de porter atteinte à l’environnement » demandait l’annulation d’une convention d’occupation domaniale ayant pour objet le confortement des voies, l’enfouissement de réseaux et l’implantation en surplomb de pales d’éoliennes sur deux voies communales.

La Cour relève que cette convention n’a ni pour objet, ni pour effet d’autoriser la construction et l’exploitation du parc éolien.

Elle refuse alors de reconnaitre un lien direct entre les intérêts environnementaux ou patrimoniaux que l’association requérante s’est donnée comme mission de défendre, visant pourtant directement la réalisation de projets éoliens, et l’objet de la convention attaquée, la Cour relevant le caractère « étranger » de l’objet de la convention vis-à-vis des intérêts défendus par l’association.

En conséquence, la Cour rejette pour irrecevabilité la requête tendant à l’annulation de la convention d’occupation du domaine public.

CAA Lyon, 13 juillet 2022, Association À Vent Garde, n° 20LY00422

Energie / Environnement

Eolien : une société peut justifier d’un intérêt à agir contre les règles du PLU empêchant la réalisation d’un projet éolien

Alors même que la réalisation d’un parc éolien est désormais dispensée de permis de construire, l’autorisation de ces équipements « ne peut méconnaître les règles d’urbanisme applicables aux terrains sur lesquels ils doivent être implantés ». Ainsi, un Tribunal ne peut rejeter pour irrecevabilité le recours d’une société de développement dirigé contre une décision de la commune rejetant sa demande de modifier le PLU sans lui avoir demandé de régulariser sa demande. La société ayant produit en appel les promesses de bail emphytéotique conclues avec des propriétaires de parcelles situées sur le territoire de la commune, la CAA a annulé la décision du TA et renvoyé l’affaire.
CAA Bordeaux, 07/07/2022, 22BX00486

Dérogation Espèces protégées (DEP)

Saisi d’un recours contre la dérogation à l’interdiction de destruction des espèces protégées dans le cadre du projet éolien en mer de Noirmoutiers, le Conseil d’Etat indique i) que la demande de DEP n’a pas à contenir une présentation globale du projet précisant l’ensemble des opérations nécessaires (raccordement + aérogénérateurs) et les potentiels impacts en résultant et ii) que le point de savoir si la condition de maintien dans un état de conservation favorable des espèces protégées relève de l’appréciation souveraine des juges du fond.
CE, 29 juillet 2022, n°443420

Projet de loi d’accélération des énergies renouvelables a été déposé auprès du CNTE (conseil national de la transition écologique) et du Conseil d’Etat le 25 août 2022

Le texte contient 20 articles et prévoit parmi d’autres mesures : des mesures de simplification qui bénéficieront à certains projets seulement et pour une durée limitée de 48 mois (faciliter la mise en compatibilité des PLUi, accélération des procédures d’instruction…), des mesures prioritaires d’accélération pour les projets photovoltaïques et de l’éolien en mer, d’autres mesures (reconnaître la RIIPM aux projets d’énergies renouvelables, simplification des procédures de raccordement, ouvrir la possibilité de combiner d’un contrat de complément de rémunération et d’un PPA…)
Le texte devrait être présenté au Conseil des ministres mi-septembre, puis sera suivi d’un débat parlementaire au mois d’octobre.

Actualités législative et réglementaire

  • Exemption pour les installations sur toitures, ainsi que celles sur ombrières situées sur des aires de stationnement
  • Evaluation systématique pour les Installations d’une puissance ≥ 1 MWc (sauf ombrières)
  • Evaluation au cas par cas pour les Installations d’une puissance ≥ 300 kWc

Un autre décret devrait modifier le code de l’urbanisme afin que seuls les installations d’une puissance ≥ 1 MWc soient soumis à permis de construire

Ce décret définit l’organisation et les missions de l’inspection générale de l’environnement et du développement durable qui remplace le « Conseil général de l’environnement et du développement durable » (CGEDD) et veille à l’indépendance et l’impartialité des travaux des membres du service d’inspection générale.

Contrats Publics

Les contrats passés par un concessionnaire aéroportuaire sont de droit privé, sauf si la concession peut être qualifiée de contrat de mandat

Dans une décision du 4 juillet 2022, le Tribunal des conflits est venu rappeler que les contrats conclus par un concessionnaire sont, en principe, de droit privé, sauf exception.

Le Tribunal des conflits rappelle, d’abord, qu’une personne morale de droit privé, chargée de l’exploitation d’un aérodrome et de la fourniture du service aéroportuaire au titre d’un contrat de concession conclu avec l’État, n’a pas la qualité de mandataire de l’État. Il n’en va autrement que s’il résulte des stipulations qui définissent sa mission ou d’un ensemble de conditions particulières prévues pour l’exécution de celle-ci, que la concession doit en réalité être regardée, en partie ou en totalité, comme un contrat de mandat.

En l’espèce, le Tribunal des conflits a considéré qu’aucune de ces conditions particulières n’était remplie et qu’en conséquence, les contrats passés par le concessionnaire pour la réalisation des travaux de rénovation du balisage lumineux des pistes de l’aérodrome sont des contrats de droit privé et que les litiges y afférents relèvent de la compétence de la juridiction judiciaire.
Tribunal des conflits, 4 juillet 2022, Allianz global corporate et Aéroport Toulouse Blagnac, n°C4247

Le règlement de la consultation prévu par une autorité délégante est obligatoire dans toutes ses mentions, sous réserve de deux exceptions : l’inutilité ou l’erreur matérielle

Par une décision du 20 juillet 2022, le Conseil d’État réaffirme, sous la forme d’un considérant de principe, la force obligatoire du règlement de consultation relatif à la passation d’un contrat de concession et les deux seuls cas dans lesquels l’autorité concédante peut ne pas tenir compte d’un manquement à ce règlement :
lorsque l’exigence du règlement de consultation « se révèle manifestement dépourvue de toute utilité pour l’examen des candidatures ou des offres » ou
« si la méconnaissance de cette exigence résulte d’une erreur purement matérielle d’une nature telle que nul ne pourrait s’en prévaloir de bonne foi dans l’hypothèse où le candidat verrait son offre retenue. »

En l’espèce, la Cour administrative d’appel de Marseille avait relevé que si le projet de contrat soumis à la commune par le candidat ne comportait ni son nom, ni le montant de la redevance qu’il proposait, il ne pouvait s’agir d’irrégularités de nature à écarter sa candidature dès lors que l’identité du candidat ressortait de la lettre de présentation de la candidature et que le montant de la redevance était énoncé dans une fiche distincte.

Le Conseil d’État considère qu’aucune des deux exceptions admises au caractère obligatoire du règlement de consultation n’était ici invocable en considérant que les informations manquantes « étaient nécessaires à l’autorité délégante pour s’assurer de l’identité de la personne avec laquelle elle contracterait, et ne peuvent, dès lors, être regardées comme ayant été manifestement inutiles », et que par ailleurs « l’omission en cause ne saurait être regardée comme une erreur purement matérielle, aucune des informations relatives à l’identité du titulaire de la concession n’ayant été renseignée dans le projet de contrat ».
CE, 20 juillet 2022, Commune du Lavandou, n° 458427

Le non-renouvellement d’un contrat public n’est pas une décision de résiliation susceptible de justifier la reprise des relations contractuelles

Le Conseil d’État est venu préciser sa décision du 21 mars 2011 dit  » Béziers II » (n° 304806) par laquelle il a admis, pour la première fois, que le juge administratif pouvait ordonner aux parties la reprise de leurs relations contractuelles interrompues par une décision de résiliation.

Dans la présente affaire, le requérant contestait le refus de la commune de renouveler la convention d’occupation temporaire du domaine public portuaire lui permettant de bénéficier d’un poste d’amarrage.

Le Conseil d’État a considéré que si la décision de résiliation peut donner lieu à la reprise des relations contractuelles, il en va différemment de la décision de refus du renouvellement qui s’analyse comme une mesure d’exécution du contrat, susceptible d’ouvrir uniquement un droit à indemnité :

« Le juge du contrat ne peut, en principe, lorsqu’il est saisi par une partie d’un litige relatif à une mesure d’exécution d’un contrat, que rechercher si cette mesure est intervenue dans des conditions de nature à ouvrir droit à indemnité. Toutefois, une partie à un contrat administratif peut, eu égard à la portée d’une telle mesure d’exécution, former devant le juge du contrat un recours de plein contentieux contestant la validité de la résiliation de ce contrat et tendant à la reprise des relations contractuelles. Cette exception relative aux décisions de résiliation ne s’étend pas aux décisions de la personne publique refusant de faire application de stipulations du contrat relatives à son renouvellement. Il s’agit alors de mesures d’exécution du contrat qui n’ont ni pour objet, ni pour effet de mettre unilatéralement un terme à une convention en cours. »

Dès lors, le Conseil d’État censure la décision de la Cour administrative d’appel qui avait annulé le refus de la commune de renouveler la convention.
CE, 13 juillet 2022, Commune de Sanary-sur-Mer, n° 458488

Précisions sur la notion de dépenses utiles en cas d’annulation d’un marché

Saisi dans le contexte particulier de pratiques anticoncurrentielles ayant justifiées l’annulation d’un marché pour entente, le Conseil d’État est venu préciser la notion de dépenses utiles.

Après avoir rappelé que « les dépenses utiles comprennent, à l’exclusion de toute marge bénéficiaire, les dépenses qui ont été directement engagées par le cocontractant pour la réalisation des fournitures, travaux ou prestations destinés à l’administration » le Conseil d’État considère que seule une quote-part des frais généraux peut être prise en compte au titre des dépenses utiles.

En revanche, ne peuvent pas être regardés comme utilement exposés pour l’exécution du marché :
les frais de communication ;
les frais financiers engagés par le cocontractant dans le cadre d’un marché public, sauf s’il s’agit d’un marché de partenariat.
CE, 17 juin 2022, Société Lacroix City Saint-Herblain, n° 454189

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