Décret RIIPM
Ce décret fixe les seuils de puissance au-delà desquels les projets de production d’énergies renouvelables en France métropolitaine continentale sont réputés répondre à une raison impérative d’intérêt public majeur (« RIIPM ») au sens de l’article L. 411-2 du code de l’environnement. Ces seuils sont les suivants :
- Photovoltaïque au sol : puissance ≥ 2,5 MWc
- Eolien terrestre : puissance ≥ 9 MW
- Production de biogaz : production annuelle prévisionnelle totale ≥ 12 GWh par an
- Production hydroélectrique gravitaire : puissance maximale brute prévisionnelle totale de l’installation ≥ 1 MW
- Projet de station de transfert d’énergie par pompage : puissance ≥ 1 MW
Décret éolien en mer
Ce décret augmente la durée des concessions pour ces installations (de 40 à 50 ans), élargit la compétence en premier ressort du Conseil d’Etat, prévoit des indications supplémentaires en cas d’allotissement, organise les échanges d’informations relatives aux études techniques et environnementales sur les installations et précise les modalités d’autorisation des études préalables à la pose ou à l’enlèvement des câbles et pipelines sous-marins en mer territoriale et dans les eaux intérieures.
Ce décret s’appliquera dans les prochains cahiers des charges (à l’exception de certaines dispositions applicables dès le 1er janvier 2024).
ENERGIE / ENVIRONNEMENT/ URBANISME
Eolien : l’opposition locale de riverains ne caractérise pas, en tant que telle, une atteinte aux intérêts visés à l’article L. 511-1 du code de l’environnement
Par un arrêt du 7 novembre 2023, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a annulé un arrêté de refus de demande d’autorisation environnementale et délivré l’autorisation sollicitée aux motifs notamment que l’opposition de certains riverains ne traduisait pas, en tant que telle, une atteinte aux intérêts visés à l’article L. 511-1 du code de l’environnement.
CAA Bordeaux, 7 novembre 2023, n°21BX03391
Eolien / judiciaire : démolition d’un parc sous astreinte
Par un arrêt du 7 décembre 2023, la Cour d’appel de Nîmes a confirmé un jugement du Tribunal judiciaire de Montpellier condamnant l’exploitant d’un projet éolien à démolir, sous astreinte, les éoliennes et le poste de distribution du parc après l’invalidation de son permis de construire par les juridictions administratives.
CA Nîmes, 7 décembre 2023, n° 23/00353, 23/00634
Photovoltaïque : Annulation de refus de permis de construire en raison de la compatibilité des projets photovoltaïques avec le maintien d’une activité agricole significative
Par des jugements rendus respectivement le 12 décembre 2023 et le 29 décembre 2023, les tribunaux administratifs de Montpellier et d’Amiens ont annulé des arrêtés préfectoraux refusant de délivrer des permis de construire pour la réalisation de projets photovoltaïques. Ils ont sanctionné ces décisions de refus en considérant que les projets, implantés sur des parcelles cultivées et prévoyant le développement de l’activité d’élevage ovin permettaient l’exercice d’une activité agricole et pastorale significative.
TA Montpellier, 12 décembre 2023, n°2303136
TA d’Amiens, 29 décembre 2023, n°2300908
Photovoltaïque : permis de construire / tardiveté du recours
Par un jugement du 2 novembre 2023, le Tribunal administratif de Besançon a rappelé qu’en application du nouvel article R. 311-6 du code de justice administrative, un recours gracieux ne prorogeait plus le délai de recours contentieux s’agissant d’un projet photovoltaïque au sol. En l’espèce, les juges ont jugé la requête tardive dès lors que les requérants avaient eu « connaissance acquise » de l’existence du permis de construire litigieux au plus tard à la date d’envoi de leur recours gracieux.
TA Besançon, 2 novembre 2023, n°2300971
Par un jugement du 23 novembre 2023, le Tribunal administratif de Dijon a jugé, s’agissant d’un projet photovoltaïque au sol, que la requête dirigée contre le permis de construire était tardive en application de l’article R. 600-2 du code de l’urbanisme : la circonstance que le panneau d’affichage de ce permis était situé non pas sur le terrain d’assiette n’était pas susceptible de rendre les délais de recours inopposables, dès lors que ce panneau était positionné « à proximité immédiate du terrain d’assiette du projet, et visible depuis la voie publique ».
TA Dijon, 23 novembre 2023, n°2201490
Urbanisme :
Par un arrêt du 1er décembre 2023, le Conseil d’Etat a jugé que l’auteur d’une demande de permis de construire pouvait apporter à son projet, pendant la phase d’instruction de sa demande, des modifications qui n’en changent pas la nature, en adressant une demande en ce sens accompagnée de pièces nouvelles qui sont intégrées au dossier afin que la décision finale porte sur le projet modifié.
CE, 1er décembre 2023, n°448905, Publié au recueil Lebon
CONTRATS PUBLICS
Nouveaux seuils européens applicables au 1er janvier 2024
À compter du 1er janvier 2024, les seuils de procédure formalisée sont de :
• 143 000 € HT pour les marchés de fournitures et de services des autorités publiques centrales ;
• 221 000 € HT pour les marchés de fournitures et de services des autres pouvoirs adjudicateurs et pour les marchés publics de fournitures des autorités publiques centrales opérant dans le domaine de la défense ;
• 443 000 € HT pour les marchés de fournitures et de services des entités adjudicatrices et pour les marchés de fournitures et de services passés dans le domaine de la défense ou de la sécurité ;
• 5 538 000 € HT pour les marchés de travaux et pour les contrats de concessions.
Les nouveaux seuils de procédure formalisée sont en légère hausse (entre 2 et 3%) par rapport à 2022-2023.
Centrale hydroélectrique : une convention d’exploitation est un contrat de droit privé
Le Tribunal des conflits a considéré, dans une décision en date du 9 octobre 2023, qu’une convention par laquelle une commune, titulaire d’une autorisation préfectorale lui permettant de disposer de l’énergie des rivières passant sur son territoire, a confié à une société commerciale, pour 29 ans, la construction, la gestion et l’exploitation d’une centrale de production d’énergie hydroélectrique, l’électricité ainsi produite étant vendue à Électricité de France (EDF), était un contrat de droit privé relevant de la compétence du juge judiciaire.
Cette décision intervient postérieurement à la décision du 15 juin 2023 (n°21-22.816) par laquelle la Cour de cassation avait requalifié en BEA un bail emphytéotique au motif que « la mise à disposition, par l’effet d’un bail emphytéotique consenti par une commune à une société, d’une centrale hydroélectrique, en vue de la production et de la vente d’électricité à un fournisseur d’énergie, en ce qu’elle favorise la diversification des sources d’énergie et participe au développement des énergies renouvelables, constitue une opération d’intérêt général relevant de la compétence de la commune ». La Cour en déduisait que les litiges nés de ce BEA relevait des juridictions de l’ordre administratif.
Des précisions jurisprudentielles seront utiles pour affiner la qualification juridique de ces contrats.
Des difficultés financières peuvent justifier la résiliation d’un marché pour motif d’intérêt général
Après avoir rappelé que, en vertu des règles générales applicables aux contrats administratifs, la personne publique cocontractante peut toujours, pour un motif d’intérêt général, résilier unilatéralement un tel contrat, sous réserve des droits éventuels à indemnité de son cocontractant compensant aussi bien les pertes subies que le manque à gagner, la CAA de Toulouse poursuit et considère que « les difficultés financières rencontrées par une personne publique peuvent constituer un motif d’intérêt général de nature à justifier la résiliation d’un contrat administratif. »
En l’espèce, une commune de 3500 habitants avait attribué un marché de travaux pour l’aménagement d’une médiathèque devant être financée à plus de 60% par des subventions versées par le département et la région. Faute d’avoir obtenu le montant des subventions escompté, la commune a abandonné le projet et résilié le marché afin d’accorder la priorité aux investissements présentant un caractère supportable pour les finances communales. Dans ces conditions, la CAA de Toulouse a considéré que « les contraintes budgétaires ayant conduit à l’abandon du projet d’aménagement de la médiathèque communale constituent un motif d’intérêt général de nature à justifier, à lui seul, la résiliation unilatérale du marché en litige ».
CAA de Toulouse, 17 octobre 2023, n° 21TL23381
Le titulaire d’un accord-cadre multi-attributaires peut contester la validité du marché dans le cadre d’un recours en contestation de validité du contrat
Dans un avis du 24 novembre 2023, le Conseil d’État a considéré que lorsqu’un accord-cadre est conclu avec plusieurs opérateurs économiques, chacun de ses titulaires doit être regardé comme un tiers vis-à-vis des accords conclus avec les autres opérateurs, pour l’exercice de l’action en contestation de la validité du contrat (CE, 4 avril 2014, Tarn et Garonne, n°358994).
Par suite, saisi par l’un des titulaires d’un recours en contestation de la validité de l’accord-cadre en tant qu’il a été conclu avec d’autres opérateurs économiques, le juge du contrat peut prononcer, le cas échéant, la résiliation ou l’annulation de cet accord en tant qu’il a été attribué à ces autres opérateurs dès lors qu’il est affecté de vices qui ne permettent pas la poursuite de son exécution. La circonstance qu’une telle annulation ou une telle résiliation aurait pour effet de ramener le nombre des titulaires de cet accord-cadre à un nombre inférieur à celui envisagé par le règlement de la consultation est sans incidence sur la possibilité pour le juge de la prononcer.
CE, Avis, 24 novembre 2023, n°474108
Dans le cadre d’un recours portant sur l’exécution du contrat, le juge ne peut pas prononcer sa résiliation
Le Tribunal administratif de Marseille a annulé le contrat d’exploitation des services ferroviaires régionaux pour la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2016, alors qu’il était uniquement saisi d’un litige indemnitaire relatif à l’exécution de ce contrat. Si la région PACA avait invoqué en défense, par la voie de l’exception, le caractère illicite du contenu du contrat, elle ne l’avait pas saisi d’un recours de plein contentieux contestant la validité de celui-ci.
Le Conseil d’État annule cette décision en considérant que le Tribunal ne pouvait, sans méconnaître son office, annuler le contrat litigieux, alors qu’il était saisi d’un litige relatif à l’exécution de ce contrat et que le caractère illicite du contenu dudit contrat était soulevé par la seule voie de l’exception.
Autrement dit, si le juge peut faire usage de toutes les mesures à sa disposition, il peut le faire uniquement dans le cadre du recours qui lui est soumis. Ainsi, si l’action porte sur une mesure d’exécution, le juge ne peut annuler le contrat en lui-même. La circonstance que le juge ait ainsi statué ultra petita est un moyen d’ordre public.
CE, 27 novembre 2023, n°462445
Recours en contestation de la validité du contrat : pour les élus, le délai de deux mois commence à courir à compter de la séance autorisant la conclusion du contrat
La CAA de Nantes a considéré que le délai de deux mois permettant de déposer un recours en contestation de la validité du contrat devant le juge administratif, commence à courir pour les élus, à compter de la séance portant sur l’adoption de la délibération autorisant la signature du contrat dès lors que « les membres de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné ayant été régulièrement convoqués à la séance où a été discutée et adoptée la délibération autorisant la conclusion d’un contrat sont réputés avoir eu connaissance de ce contrat s’ils ont été mis à même, à l’occasion de cette séance, de s’informer des principales caractéristiques de celui-ci, soit au moins l’objet du contrat et l’identité des parties contractantes ».
Cette connaissance serait équivalente aux mesures de publicité faisant habituellement courir le délai de recours contentieux de deux mois.
En l’état, la question se pose de savoir si le Conseil d’État validera cette analyse, dans la mesure où elle conduit à faire courir le délai de recours contre la validité du contrat avant même que le contrat ne prenne effet par sa notification à l’attributaire, pourtant requise par les articles R.2182-4 et R.2182-5 du code de la commande publique.
CAA de Nantes, 13 novembre 2023, Commune de Tilly-sur-Seulles, n°22NT01435
Nouveau motif d’exclusion facultative relatif à la publication des informations en matière de durabilité
L’ordonnance n°2023-1142 du 6 décembre 2023 prévoit en son article 27 un nouveau motif d’exclusion facultatif applicable aux marchés publics et aux concessions pour les entreprises qui ne respectent pas leurs obligations de publication d’informations en matière de durabilité prévues aux articles L. 232-6-3 et L. 233-28-4 du code de commerce.
Ces dispositions viennent modifier l’article 2141-7-1 du code de la commande publique pour les marchés publics et L. 3123-7-1 du même code pour les concessions.
Elles entrent en vigueur le 1er janvier 2026 et s’appliquent aux contrats pour lesquels une consultation est engagée ou un avis de publicité est envoyé à la publication à compter de cette date.
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