Articles

< Retour

Les acheteurs publics incités à privilégier l’acquisition de biens issus de l’économie circulaire

Le décret n°2024-134 du 21 février 2024, pris en application de la loi AGEC, encourage les acheteurs publics à accroître la part des acquisitions de biens issus du réemploi, de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées en fixant par catégorie de produits (tels que par exemple : textile, papier, fournitures de bureau, mobilier urbain, informatique, etc.) les proportions minimales de biens issus du réemploi ou de la réutilisation et les proportions minimales de biens intégrant des matières recyclées.
Ces proportions sont exprimées en pourcentage du montant annuel hors taxes de la dépense consacrée à l’achat de chaque catégorie de produits au cours d’une année civile.
Une progression pluriannuelle de ces pourcentages est prévue jusqu’en 2030, sans toutefois qu’aucun mécanisme de sanction n’y soit adossé.
Les objectifs les plus ambitieux sont ceux fixés pour les véhicules, avec un objectif fixé à 70 % d’acquisition de biens intégrant des matières recyclées d’ici 2030 (contre 40 % en 2024).
Ce décret entre en vigueur le 1er juillet 2024.
Décret n° 2024-134 du 21 février 2024 relatif à l’obligation d’acquisition par la commande publique de biens issus du réemploi ou de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées et à l’interdiction d’acquisition par l’État de produits en plastique à usage unique

Deux arrêtés d’application ont suivi :

Arrêté du 29 février 2024 précisant la liste des produits relevant de chaque catégorie de produits soumise à l’obligation d’acquisition de biens issus du réemploi ou de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées
Arrêté du 29 février 2024 fixant la grille de valeur forfaitaire permettant la comptabilisation des dons acquis en application de l’article 58 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire

ENERGIE / ENVIRONNEMENT

Eolien : clarification par le Conseil d’Etat de l’autonomie de l’avis rendue par la MRAe et de l’exception d’illégalité d’une procédure de mise en compatibilité d’un PLU : CE, 5 février 2024, n°463619 et 463620 :

Par une décision du 5 février 2024, le Conseil d’État a précisé sa jurisprudence relative à l’autonomie de l’Autorité environnementale.
Le Conseil d’État a cassé pour erreur de droit l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Nancy qui avait considéré que l’appui que la MRAe avait reçu de la part de la DREAL et notamment la présence de sa directrice régionale adjointe, s’opposait à ce qu’elle dispose d’une autonomie réelle à l’égard du préfet compétent pour autoriser le projet.
Le Conseil d’Etat dégage ainsi une présomption d’autonomie de la MRAe qui délivre son avis dans les conditions postérieures au décret du 28 avril 2016 alors même qu’elle bénéficie de l’appui technique d’agents de la DREAL dès lors qu’ils sont placés sous l’autorité fonctionnelle du président de la MRAe. Cette solution est bienvenue.
Il a également clarifié l’articulation entre l’évaluation environnementale préalable de la mise en compatibilité du PLU nécessaire à la réalisation d’un parc éolien et l’autorisation d’exploiter le projet éolien.
Le conseil d’Etat a ici repris l’avis SCI du Petit Bois (CE, avis, 2 octobre 2020, n°436934) qui distingue les illégalités externes, qui sont sans rapport avec les règles de fond applicables au projet, sauf si elles ont été de nature à exercer une influence directe sur celui-ci, des illégalités internes, pour lesquelles la présomption est inverse.
Il a jugé que l’absence d’évaluation environnementale était une illégalité externe qui n’était pas applicables au projet lui-même, de sorte qu’elle ne pouvait affecter la légalité de l’autorisation d’exploiter le parc éolien.

Eolien et saturation visuelle : CAA, Versailles, 26 janv. 2024, n° 21VE02981

Par un arrêt du 26 janvier 2024, la Cour administrative de Versailles a rappelé la méthode d’appréciation par le juge des inconvénients pour la commodité du voisinage, et notamment de l’effet de saturation visuelle, susceptible d’être généré par un projet éolien : le juge tient compte des angles d’occupation de l’horizon par des éoliennes et des angles de respiration dont les seuils « ne revêtent qu’une valeur indicative » et leur dépassement « qu’un indice des effets de saturation ».
Le juge précise également que l’analyse de l’effet d’encerclement et de saturation doit être menée à partir des « points de vue pertinents », c’est-à-dire en l’espèce depuis les lieux d’habitation invoqués par les parties. En revanche, les simples zones de passage (entrées et sorties des agglomérations) n’ont pas à être prises en compte car il ne s’agit pas de « lieux de vie ».

Photovoltaïque/ agrivoltaïque : deux exemples de régularisation de permis de construire CAA Marseille, 15 février 2024, n° 23MA00413

La Cour administrative d’appel de Marseille était saisie d’un arrêté de permis de construire et d’un arrêté de permis modificatif relatifs à la réalisation d’une centrale photovoltaïque située sur un terrain agricole jouxtant un site industriel de raffinage et de conversion de l’uranium.
Le Conseil d’Etat avait déjà jugé que le projet était en continuité avec les agglomérations et des villages existants ou dans les secteurs déjà urbanisés » issue de la loi Littoral (notre newsletter mars 2023). La Cour a confirmé cette appréciation et a rejeté les autres moyens soulevés par les voisins requérants (incompatibilité du projet avec une activité agricole, exception d’illégalité du PLU, méconnaissance de la distance aux limites séparatives).
La Cour a néanmoins estimé qu’il n’était pas démontré que les mesures d’aménagement et de plantations permettaient d’obstruer la vue sur le parc solaire depuis les propriétés voisines ainsi que cela est prescrit par le règlement du PLU mais a ensuite considéré que ce vice était régularisable sur le fondement de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme.

TA Dijon, 26 janvier 2024, n° 2300854

Par un jugement du 26 janvier 2024, le tribunal administratif de Dijon a jugé, s’agissant d’un projet de parc agrivoltaïque, que les permis de construire attaqués étaient illégaux au motif que « le séchoir thermovoltaïque, dont les incidences sur l’environnement n’ont pas été analysées dans l’étude d’impact […], n’a pas davantage été présenté dans les dossiers de demande de permis de construire », jugeant ainsi qu’il s’agissait d’un seul « projet » au sens notamment de l’article L.122-1 du code de l’environnement.
Il a toutefois jugé que ce vice était régularisable et a sursis à statuer sur la requête pour permettre à la société pétitionnaire de notifier au tribunal des mesures de régularisation.

CONTRATS PUBLICS

Le seuil permettant aux entités adjudicatrices d’autoriser la remise d’offres variables est enfin fixé

L’article L.2151-1 du code de la commande publique, dans sa rédaction issue de l’article 28 de la loi n°2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l’industrie verte, permet aux entités adjudicatrices d’autoriser dans leurs procédures de marchés la présentation d’offres variables selon le nombre de lots susceptibles d’être obtenus.
Ces dispositions sont précisées par le décret n°2023-1292 du 27 décembre 2023 qui réserve cette possibilité aux marchés des entités adjudicatrices dont la valeur estimée est supérieure à 10 millions d’euros hors taxe.
Il s’agit d’une dérogation au principe selon lequel, en cas d’allotissement, les opérateurs économiques ne peuvent présenter des offres variables selon le nombre de lots susceptibles d’être obtenus.

Décret n°2023-1292 du 27 décembre 2023 fixant le seuil d’application des offres variables dans les procédures de marchés passées par les entités adjudicatrices

Mise à jour des données essentielles devant être publiées pour les marchés publics et les concessions

La liste des formats, normes et nomenclatures dans lesquels les données essentielles des marchés publics et contrats de concession doivent être publiées ainsi que les modalités de leur publication ou communication a été mise à jour par deux arrêtés en date du 22 décembre 2022.
Ces dispositions figurent à l’annexe 15 du code de la commande publique.
Elles sont en vigueur depuis le 1er janvier 2024.

Arrêté du 22 décembre 2023 modifiant l’arrêté du 22 décembre 2022 relatif aux données essentielles des marchés publics
Arrêté du 22 décembre 2023 modifiant l’arrêté du 22 décembre 2022 relatif aux données essentielles des contrats de concession

Le refus de communication d’un document administratif peut être justifié en raison d’une impossibilité technique de l’administration

Par une décision du 20 décembre 2023, le Conseil d’État est venu précisé l’étendu du doit à communication dont bénéfice les administrés en application des articles L. 311-1 et L. 311-9 du code des relations entre le public et l’administration en considérant que les demandes de communication qui excèdent les possibilités techniques de l’administration doivent s’apprécier au regard des outils informatiques dont elle dispose et non des outils qu’elle pourrait développer ou qui pourraient être mis à sa disposition notamment par le demandeur.
En l’espèce l’association requérante demandait la communication de documents budgétaires de collectivités territoriales comportant des données à caractère personnel et représentant plusieurs centaines de milliers de fichiers.
Le Conseil d’Etat relève que « D’une part, l’anonymisation manuelle de ces documents ferait, à l’évidence, peser une charge disproportionnée sur l’administration saisie au regard des moyens dont elle dispose. D’autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que les services du ministère de l’intérieur et des outre-mer disposeraient d’un outil informatique permettant de procéder de façon satisfaisante à l’anonymisation des données personnelles de manière automatisée. »
En conséquence, la demande de communication est rejetée en ce qu’elle excède les possibilités techniques de l’administration.

CE, 20 décembre 2023, Association Ouvre-boîte c/ Ministère de l’Intérieur et des Outre-mer, n° 467161.

Le candidat irrégulièrement évincé doit avoir été le seul à disposer d’une chance sérieuse d’emporter le contrat pour être indemnisé du manque à gagner

Par une décision du 28 novembre 2023, le Conseil d’État est venu préciser que l’existence d’une chance sérieuse de remporter le contrat ne se partage pas avec d’autres candidats.
Concrètement, un seul des candidats irrégulièrement évincés peut être indemnisé de son manque à gagner dès lors qu’il « aurait eu des chances sérieuses d’emporter le contrat au contraire de tous les autres candidats ».

CE, 28 novembre 2023, Commune de Saint-Cyr-sur-Mer, n° 468867

Indemnisation des créances cédées en cas de résiliation d’un contrat de partenariat

La société requérante, titulaire d’un contrat de partenariat pour le transfert, la restructuration et l’agrandissement d’un musée finalement résilié, demandait l’indemnisation des loyers ayant fait l’objet d’une cession de créances à son bénéfice.
Le Conseil d’État relève que le contrat de partenariat subordonnait l’acceptation de la cession de créances à la mise à disposition des bâtiments et des équipements.
La circonstance que (i) le conseil municipal ait confirmé par délibération l’acceptation de la cession des créances et que (ii) la commune ait versé des montants correspondant aux loyers faisant l’objet de la cession de créance ne permettait pas de rendre irrévocables ces loyers : la cession de créance n’étant pas définitivement acquise en l’absence de mise à disposition des bâtiments et équipements.
En conséquence, la demande d’indemnisation des créances cédées non définitivement acquises est rejetée.

CE, 19 janvier 2024, n°471606

La perte de confiance justifie la résiliation pour motif d’intérêt général

Saisie par une société requérante contestant la résiliation unilatérale de son contrat d’affermage et demandant la reprise des relations contractuelles en application de la jurisprudence Béziers II (CE, 21 mars 2011, req. n° 304806), la Cour administrative de Nantes a considéré que les négligences commises par la requérante (ie. travaux non autorisés, remise de rapports d’activités incomplets et tardivement, retards de paiement des redevances, etc.) justifiaient la résiliation pour motif d’intérêt général à raison de la détérioration des relations contractuelles née d’une perte de confiance entre les parties.
Les conclusions tendant à la reprise des relations contractuelles sont rejetées, de même que les conclusions indemnitaires.

CAA de Nantes, 19 janvier 2024, n° 22NT02651

Voir aussi...